Couteau suisse du patrimoine, l’assurance-vie joue un rôle déterminant dans une stratégie de transmission ciblée. La désignation du bénéficiaire constitue le cœur de cet outil, cristallisant la volonté du souscripteur quant au sort des capitaux à son décès. Cependant, quid des dispositions y afférentes en cas de divorce ? Le maintien ou la caducité de la clause bénéficiaire devient alors un enjeu juridique majeur.
La clause bénéficiaire : un acte de disposition à part entière
La clause bénéficiaire peut être standard (“mon conjoint, à défaut mes enfants”) ou nominative. Le ou les individus désignés percevront le capital au décès suivant les articles 1121 et suivants du Code civil. Jusqu’à cette échéance, celle-ci peut être librement modifiée, sauf acceptation irrévocable du bénéficiaire.
Le divorce, quant à lui, est un fait juridique susceptible d’altérer les intentions du souscripteur initialement exprimées.
L’effet du divorce sur la clause bénéficiaire
La clause standard (“mon conjoint”)
Si la clause prévoit « mon conjoint » et que le divorce est prononcé avant le décès, le bénéficiaire désigné n’est plus juridiquement le conjoint au moment du décès. Par conséquent, la clause devient inopérante pour l’ex-conjoint, et les capitaux sont versés au bénéficiaire de rang suivant (souvent les enfants).
Exemple : la clause type prévoit « mon conjoint, à défaut mes enfants ». Le divorce survient. À son décès, l’assuré n’a pas modifié la clause. L’ex-conjoint étant déchu de la qualité de conjoint, ce sont les enfants qui reçoivent le capital.
La clause nominative
Si l’ex-conjoint est expressément indiqué par nomination, le divorce ne remet pas automatiquement en cause la désignation. Le capital pourra toujours être versé à l’ex-épouse, sauf modification volontaire par le souscripteur.
En effet, contrairement à ce que l’on pourrait croire, le divorce n'entraîne pas automatiquement la révocation de la clause bénéficiaire au profit de l’ex-conjoint. Exemple : « Je désigne comme bénéficiaire Madame X, mon épouse ». Le divorce est prononcé. Si la clause n’est pas révoquée ou modifiée, Madame X, bien qu’ex-épouse, reste bénéficiaire.
Acceptation du bénéfice : verrou juridique
L’acceptation par le bénéficiaire, si elle est intervenue du vivant du souscripteur, fige la désignation. Depuis la loi du 17 décembre 2007, cette acceptation ne peut se faire qu’avec l’accord du souscripteur. En cas d’acceptation, le changement de bénéficiaire n’est plus possible sans le consentement du bénéficiaire.
Cette situation peut poser des problèmes majeurs si l’ex-conjoint a accepté le bénéfice du contrat avant le divorce, bloquant ainsi la volonté future du souscripteur.
Préconisations pratiques : l’impératif de vigilance
Face à cette incertitude, sensibiliser à la nécessité de revoir systématiquement la clause bénéficiaire à l’occasion d’un divorce est capital. À défaut, les conséquences peuvent être contraires à la volonté définie.
Ainsi, il est question de vérifier si la clause désigne un bénéficiaire nominativement ou par qualité (époux/épouse). Idem, s’assurer qu’il n’y a pas eu d’acceptation du bénéficiaire. Modifier la clause bénéficiaire dans les meilleurs délais après la séparation est également requis, en plus de l’intégration d’une clause de « révocation automatique en cas de divorce » lors de la rédaction initiale (bien que cette possibilité soit à manier avec prudence). En savoir plus sur euodia. fr.
En somme, l’impact du divorce sur la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie met en lumière les limites d’une gestion passive du patrimoine. Loin d’être un simple accessoire, la clause bénéficiaire doit faire l’objet d’un suivi attentif tout au long de la vie du contrat.